Avec …
Patrice Caratini contrebasse et direction
André Villéger saxophones/clarinette
Matthieu Donarier saxophones/clarinette
Rémi Sciuto saxophones/flûte
Clémént Caratini clarinettes
Claude Egea trompette
Pierre Drevet trompette
François Bonhomme cor
Denis Leloup trombone
André Villéger saxophones/clarinette
Matthieu Donarier saxophones/clarinette
Rémi Sciuto saxophones/flûte
Clémént Caratini clarinettes
Claude Egea trompette
Pierre Drevet trompette
François Bonhomme cor
Denis Leloup trombone
François Thuillier tuba
Bastien Stil tuba
Alain Jean-Marie piano
David Chevallier guitare/banjo
Thomas Grimmonprez batterie
Sebastian Quezada percussions
Abraham Mansfarroll percussions
Inor Sotolongo percussions
Bastien Stil tuba
Alain Jean-Marie piano
David Chevallier guitare/banjo
Thomas Grimmonprez batterie
Sebastian Quezada percussions
Abraham Mansfarroll percussions
Inor Sotolongo percussions
Musique originale de Patrice Caratini interprétée en direct sous l’écran
Ce chef d’œuvre méconnu du muet inspire aujourd’hui à Patrice Caratini une BO originale qui déroule, dans sa richesse et sa complexité, l’héritage musical de la diaspora noire américaine. Reconnu pour la puissance onirique de créations qui mettent en valeur les parcours croisés du blues, du jazz et des musiques caraïbes, le Caratini Jazz Ensemble inaugure une démarche totalement inédite en soulignant la force des liens qui unissent musique et cinéma noirs-américains.
Á propos de Body and Soul…
Par Sebastian Danchin
directeur artistique du Paris Jazz Festival
N’importe quel fan de jazz vous dira que Body and Soul est un standard popularisé par Louis Armstrong en 1930, neuf ans avant d’être immortalisé par Coleman Hawkins ; en revanche, il saura moins sûrement que Body & Soul est le titre de l’un des premiers chefs d’œuvre du cinéma afro-américain, un film qui a fait couler beaucoup d’encre au sein de sa communauté, au cœur des années vingt, en lançant la carrière à l’écran du chanteur, acteur et militant de la cause noire Paul Robeson.
De fait, s’il a été tourné au plus fort de ce que l’histoire aura retenu comme le Jazz Age, ce film d’Oscar Micheaux n’était pas vraiment concerné par la nouvelle école musicale qui enfiévrait l’Amérique depuis la fin de la Grande Guerre. Œuvre impressionniste portée par une intrigue à tiroirs, de magnifiques séquences oniriques et la mise en abyme de flashbacks, Body & Soul évoque le triste sort d’une jeune femme vertueuse de la Géorgie rurale, victime d’un escroc cynique (Robeson) déguisé en homme d’église. Abusée et dépouillée par son bourreau, contrainte de s’exiler, l’héroïne trouve refuge dans le ghetto d’Atlanta où elle meurt dans une misère crasse.
Ce drame social, très éloigné par son propos des bluettes qui offrent au jazz ses meilleurs standards, évoquait davantage la brutalité des rythmes du corps et les harmonies vénéneuses de l’âme que l’insouciance joyeuse de la musique jungle. Oscar Micheaux, aujourd’hui reconnu comme le père du cinéma afro-américain, a d’ailleurs provoqué l’ire de la censure blanche comme la réprobation de l’élite noire de son temps pour avoir osé dresser ce portrait « immoral et sacrilège » d’un pasteur corrompu et libidineux.
Curieusement, le long métrage de Micheaux a été l’objet d’une nouvelle controverse lors de sa projection en 2000 au New York Film Festival, accompagné d’une musique originale du tromboniste Wycliffe Gordon qu’interprétait l’orchestre Jazz at Lincoln Center de Wynton Marsalis. Trois quarts de siècle après les faits, l’intelligentsia afro-américaine du tournant du millénaire était choquée à son tour de voir à l’écran des Noirs boire, tricher, s’exprimer en petit nègre et abuser du mot nigger. Les récriminations ont été si vives que l’œuvre de Gordon s’est rapidement trouvée enterrée par des critiques que leur conformisme rendait aveugles au génie de Micheaux.
Une décennie plus tard, j’ai souhaité réhabiliter Body & Soul et mettre en lumière la vision révolutionnaire de son créateur en commandant à Patrice Caratini une partition originale, présentée lors de la soirée de clôture de la 20e édition du Paris Jazz Festival, le 28 juillet 2013. Patrice n’est pas seulement le brillant compositeur et chef d’orchestre que l’on sait ; c’est également un cinéphile averti, et son regard éclairé sur l’histoire du 7e Art le prédestinait à l’écriture d’un projet aussi ambitieux.
Dès le visionnage initial, il a compris que le portrait de l’Amérique noire des années 1920 dressé par Micheaux était à l’opposé des stéréotypes véhiculés par Hollywood entre les deux guerres. Alors que les réalisateurs « officiels », paternalistes lorsqu’ils n’étaient pas racistes, offraient au grand public la vision d’une Amérique noire exclusivement composée de serviteurs lymphatiques, d’Oncles Tom et de Mammies plantureuses, Micheaux dressait un portrait sans concession des Afro-Américains de son époque, résistant à la tentation d’un racisme inversé qui aurait consisté à les montrer sous un jour positif, tout aussi caricatural que le négativisme hollywoodien.
De la première à la dernière note de son œuvre, Patrice nous fait comprendre à quel point Micheaux a su redonner à l’Homme noir de son temps, par ce procédé réaliste, toute sa place dans l’ordre du vivant. À une époque où les Afro-Américains étaient frappés d’invisibilité, Micheaux dépeint une société complexe et contrastée, profondément humaine, dont les questionnements sont superbement soulignés par le décor brillant que nous dessine le Caratini Jazz Ensemble.
Patrice a eu l’intelligence d’éviter la facilité opportuniste d’une écriture illustrative ; il nous épargne ainsi la lecture anecdotique et mélodramatique du film qu’aurait généré une trame musicale folklorique, construite de façon attendue autour de thèmes empruntés à l’univers du blues et du gospel. Son écriture est infiniment plus subtile. Tour à tour drôle et féroce, brutale et pensive, volubile et silencieuse, son œuvre met en relief les véritables enjeux sociaux, politiques et esthétiques de Micheaux lorsqu’il demandait au public noir de son temps de différencier la spiritualité de la religion, de réfléchir aux mérites de l’éducation comme moyen privilégié d’acquérir dignité, estime de soi et honneur.
Cet album, enregistré lors de la première du ciné-concert Body & Soul au Parc Floral de Paris, donne la mesure de la formidable maîtrise de l’orchestre de Patrice, et plus encore de sa connaissance intime du jazz. Il reste à espérer que ce disque transmettra largement l’envie de venir assister, en direct, à l’une ou l’autre des projections du film données en présence du Caratini Jazz Ensemble.
Par Sebastian Danchin
directeur artistique du Paris Jazz Festival
N’importe quel fan de jazz vous dira que Body and Soul est un standard popularisé par Louis Armstrong en 1930, neuf ans avant d’être immortalisé par Coleman Hawkins ; en revanche, il saura moins sûrement que Body & Soul est le titre de l’un des premiers chefs d’œuvre du cinéma afro-américain, un film qui a fait couler beaucoup d’encre au sein de sa communauté, au cœur des années vingt, en lançant la carrière à l’écran du chanteur, acteur et militant de la cause noire Paul Robeson.
De fait, s’il a été tourné au plus fort de ce que l’histoire aura retenu comme le Jazz Age, ce film d’Oscar Micheaux n’était pas vraiment concerné par la nouvelle école musicale qui enfiévrait l’Amérique depuis la fin de la Grande Guerre. Œuvre impressionniste portée par une intrigue à tiroirs, de magnifiques séquences oniriques et la mise en abyme de flashbacks, Body & Soul évoque le triste sort d’une jeune femme vertueuse de la Géorgie rurale, victime d’un escroc cynique (Robeson) déguisé en homme d’église. Abusée et dépouillée par son bourreau, contrainte de s’exiler, l’héroïne trouve refuge dans le ghetto d’Atlanta où elle meurt dans une misère crasse.
Ce drame social, très éloigné par son propos des bluettes qui offrent au jazz ses meilleurs standards, évoquait davantage la brutalité des rythmes du corps et les harmonies vénéneuses de l’âme que l’insouciance joyeuse de la musique jungle. Oscar Micheaux, aujourd’hui reconnu comme le père du cinéma afro-américain, a d’ailleurs provoqué l’ire de la censure blanche comme la réprobation de l’élite noire de son temps pour avoir osé dresser ce portrait « immoral et sacrilège » d’un pasteur corrompu et libidineux.
Curieusement, le long métrage de Micheaux a été l’objet d’une nouvelle controverse lors de sa projection en 2000 au New York Film Festival, accompagné d’une musique originale du tromboniste Wycliffe Gordon qu’interprétait l’orchestre Jazz at Lincoln Center de Wynton Marsalis. Trois quarts de siècle après les faits, l’intelligentsia afro-américaine du tournant du millénaire était choquée à son tour de voir à l’écran des Noirs boire, tricher, s’exprimer en petit nègre et abuser du mot nigger. Les récriminations ont été si vives que l’œuvre de Gordon s’est rapidement trouvée enterrée par des critiques que leur conformisme rendait aveugles au génie de Micheaux.
Une décennie plus tard, j’ai souhaité réhabiliter Body & Soul et mettre en lumière la vision révolutionnaire de son créateur en commandant à Patrice Caratini une partition originale, présentée lors de la soirée de clôture de la 20e édition du Paris Jazz Festival, le 28 juillet 2013. Patrice n’est pas seulement le brillant compositeur et chef d’orchestre que l’on sait ; c’est également un cinéphile averti, et son regard éclairé sur l’histoire du 7e Art le prédestinait à l’écriture d’un projet aussi ambitieux.
Dès le visionnage initial, il a compris que le portrait de l’Amérique noire des années 1920 dressé par Micheaux était à l’opposé des stéréotypes véhiculés par Hollywood entre les deux guerres. Alors que les réalisateurs « officiels », paternalistes lorsqu’ils n’étaient pas racistes, offraient au grand public la vision d’une Amérique noire exclusivement composée de serviteurs lymphatiques, d’Oncles Tom et de Mammies plantureuses, Micheaux dressait un portrait sans concession des Afro-Américains de son époque, résistant à la tentation d’un racisme inversé qui aurait consisté à les montrer sous un jour positif, tout aussi caricatural que le négativisme hollywoodien.
De la première à la dernière note de son œuvre, Patrice nous fait comprendre à quel point Micheaux a su redonner à l’Homme noir de son temps, par ce procédé réaliste, toute sa place dans l’ordre du vivant. À une époque où les Afro-Américains étaient frappés d’invisibilité, Micheaux dépeint une société complexe et contrastée, profondément humaine, dont les questionnements sont superbement soulignés par le décor brillant que nous dessine le Caratini Jazz Ensemble.
Patrice a eu l’intelligence d’éviter la facilité opportuniste d’une écriture illustrative ; il nous épargne ainsi la lecture anecdotique et mélodramatique du film qu’aurait généré une trame musicale folklorique, construite de façon attendue autour de thèmes empruntés à l’univers du blues et du gospel. Son écriture est infiniment plus subtile. Tour à tour drôle et féroce, brutale et pensive, volubile et silencieuse, son œuvre met en relief les véritables enjeux sociaux, politiques et esthétiques de Micheaux lorsqu’il demandait au public noir de son temps de différencier la spiritualité de la religion, de réfléchir aux mérites de l’éducation comme moyen privilégié d’acquérir dignité, estime de soi et honneur.
Cet album, enregistré lors de la première du ciné-concert Body & Soul au Parc Floral de Paris, donne la mesure de la formidable maîtrise de l’orchestre de Patrice, et plus encore de sa connaissance intime du jazz. Il reste à espérer que ce disque transmettra largement l’envie de venir assister, en direct, à l’une ou l’autre des projections du film données en présence du Caratini Jazz Ensemble.
Sebastian Danchin
Directeur artistique du Paris Jazz Festival
Spectacle créé le 28 juillet 2013
au parc floral de Paris
au parc floral de Paris
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Coproduction : Association Jazz Ensemble/Paris Jazz Festival/C.C.production durée 1h20